Denis François Le Coat de K'veguen et Adèle Ferrand
& Motais de Narbonne et Bourayne
Figure 1 (couverture de l'article) : Portrait de Denis François Le Coat de Kerveguen avec son chien Cato, par Adèle Ferrand
Denis François Le Coat de K/veguen est le fils, né le 4 avril 1817 à Saint-Pierre, du second mariage de l’ancêtre léonard Denis Marie Fidèle Le Coat de K/veguen avec Marie Geneviève Hortense Lenormand. Souvenez-vous, ce pionnier de Landernau débarqué à La Réunion, perd sa première femme Césarine Rivière seize ans après leur union. Elle était la mère de Gabriel, qui deviendra l’opulent et célèbre planteur esclavagiste, magnat industriel du sucre et propriétaire de négoces en tout genre. (1)
Ce Denis François, garçon de « seconde main » de l’atelier de confection, si l’on peut dire, est donc le demi-frère de Gabriel, de dix-sept ans son aîné. Mais ce n’est pas pour autant qu’il passera inaperçu dans l’histoire de son île natale, effacé qu’il risquait d’être par une « première main » à moitié fraternelle.
Avant de revenir à La Réunion, il épouse à Paris le 2 février 1846 Julie Adèle Ferrand (née le 20 octobre 1817 à Nancy), une peintre et dessinatrice romantique reconnue pour la qualité de son art qui hélas décédera de la typhoïde à trente ans le 1er avril 1848 à Saint-Pierre. Les bacilles du genre salmonelle ne font pas de sentiments.
Figure 2 : Autoportrait d'Adèle Ferrand, Musée Léon-Dierx
Le jeune couple à peine uni n’aura le temps de donner vie qu’à un seul enfant, Denis Marie François Georges Paul Hervé Le Coat de Kerveguen (né le 1er décembre 1846 à Paris.)
Figure 3, Hervé de Kerveguen bébé, fils d'Adèle Ferrand
Figure 4, Projet d'un portrait de famille (Adèle, Denis et Hervé de Kerveguen), Ferrand Adèle 1848
Ce fils unique orphelin de mère (Adèle meurt un peu plus d’une année après sa naissance) devenu adulte « fait marcher les établissements » (2) qu’il a reçu en héritage. Il se marie le 30 décembre 1872 à Saint-Denis avec Marie Zélie Doussot qui met au monde Marie Auguste Fidèle Wilhem Hervé Raoul Le Coat de Kerveguen décédé prématurement et Zélie Marie Augustine Julie Hortense Adèle Le Coat de Kerveguen (23 septembre 1876 à Saint-Denis).
Cette jeune fille richissisme s’unira à Saint-Pierre le 4 août 1894 au médecin et homme politique (conseiller général, député, maire de Saint-Pierre) Pierre Edouard Augustin Archambeaud (17 mars 1868-21 septembre 1937 à Saint-Pierre).
Veuf et sans doute bien malheureux, Denis François verse lui aussi dans la politique. Imitant en cela ses demi-frères Gabriel et Augustin, il devient membre du conseil municipal de Saint-Pierre en 1849 puis se fait élire maire de la capitale du Sud de 1851 à 1853. Gabriel met alors à la disposition de la commune fraternelle des esclaves et des moyens financiers pour la construction de routes, de canaux d’irrigation (tel le canal Saint-Étienne) et pour l’alimentation en eau des populations. Ces aménagements tout en favorisant ses ambitions économiques participent ainsi à la modernisation des quartiers sudistes.
Figure 5, Esquisse pour le portrait de Denis François Le Coat de Kerveguen, Adèle Ferrand, 1847
Au milieu de son mandat, Denis François devient aussi l’élu de cœur de Augustine Motais de Narbonne (née le 21 janvier 1832 à Saint-Pierre) avec laquelle il se marie le 15 janvier 1852. Elle décédera dans la même ville le 2 mars 1865 à l'âge de 33 ans. À peine le temps de réaliser ses rêves que la mort la cueille !
Pour Denis de K/veguen, cette union était sans doute une façon de renouer avec les origines bretonnes de son père. En effet sa nouvelle épouse Augustine est la fille de Louise Lucienne Le Bidan (1793-1855 à Saint-Pierre) et d’Augustin Motais de Narbonne (1782-1844 né et décédé à Saint-Pierre), lui-même étant le fils de Charles Pierre Motais de Narbonne, né en 1746 à Hennebont dans le Morbihan (décédé le 20 mai 1809 à Saint-Pierre), et d’Anne Nathalie d'Achery de Salican (1752-1823).
Une famille illustre (3) dont l’un des frères de Charles (grand oncle d’Augustine), Augustin François Motais de Narbonne (né à Brest le 22 septembre 1747, décédé le 14 janvier 1827 à Saint-Denis de La Réunion), est commissaire général de la marine à Brest de 1763 à 1766. Il occupe ensuite les mêmes fonctions à son arrivée à Bourbon (Commissaire de la Marine et des Colonies), avant d’être nommé ordonnateur de l’Inde en 1781 et intendant des Iles de France et de Bourbon. Il sera fait Chevalier de la Légion d’honneur en 1819.
Figure 6 : Extraits dossier Légion d’honneur Motais de Narbonne Augustin François (Archives nationales ; site de Pierrefitte-sur-Seine)
Quant à la sœur de Charles Pierre Motais de Narbonne, Françoise Légère Motais (1743 Rennes-1822 Brest), elle se marie le 12 décembre 1761 à Brest avec Louis Bourayne (1718 Brest-1792 Brest). Les Bourayne génèrent une importante famille de navigateurs. L’épouse de Louis met ainsi au monde sept enfants. C’est certainement cette nombreuse descendance qui lui valut le surnom de La mère aux marins.
Leur fils aîné, Charles Bourayne (né le 23 janvier 1766 à Brest et décédé le 2 avril 1816 à Sainte-Marie de La Réunion) est arrivé à Bourbon en 1792 comme Commissaire de la marine. Il se marie le 23 messidor an V (11 juillet 1797) à Saint-Pierre avec Marie Anne Geneviève Bardinon (1767-1830).
Un autre garçon du couple Françoise Motais-Louis Bourayne, Claude « Louis » Marie Augustin Antoine Bourayne dit Concarneau (né le 8 février 1767 à Brest, décédé le 28 octobre 1820 à Sainte-Marie) était arrivé à Bourbon en 1779 (treize ans avant son frère Charles. Ce dernier l’aurait-il incité à venir s’y établir ?) comme sous-lieutenant de la Compagnie d'Artillerie de Bataille du canton de Sainte-Suzanne (1800-1802). Il fut ensuite nommé Garde-magasin général de la Marine (1806). Il était aussi, semble-t-il, régisseur des biens du sieur Motais de Narbonne.
Les Motais de Narbonne, comme les Kerveguen, ont prospéré dans l’île et leur souvenir s’inscrit par exemple jusque dans la remarquable maison créole éponyme qui sert aujourd’hui de siège à la sous-préfecture de Saint-Pierre.
Avant que les derniers héritiers Kerveguen ne quittent définitivement l’île de La Réunion, Denis Marie François Georges Paul Hervé Le Coat de Kerveguen lègue en 1922 la totalité de sa collection des œuvres de sa défunte mère Adèle Ferrand au musée Léon Dierx (24 œuvres encadrées - peintures et dessins - et 305 dessins.) (4)
Figure 7, Adèle Ferrand, Le Boucan et le Choca bleu, vers 1847
Autre retombée d’une histoire coloniale réussie, la Cour européenne des Droits de l'Homme dans son arrêt du 27 mai 2003 décide d’allouer aux requérants (Motais de Narbonne contre la France) une somme de plus de 3,2 millions d'euros pour 4,5 hectares situés à la Montagne dont la propriétaire avait été expropriée par le conseil général pour un projet de construction de logements sociaux non exécuté 19 ans plus tard. Vraiment, on ne donne qu’aux riches !
Notes :
(1) Cf. l’article précédent « Le Coat de Kerveguen ».
(2) Selon Hippolyte Charles Napoléon Mortier de Trévise mari d’Emma Le Coat de K/veguen, la fille de Gabriel de K/veguen lors d’une visite à la famille d’Adèle Ferrand, une « artiste de talent dont j’ai vu plusieurs très bons portraits » ajoute-t-il.
(3) Leurs parents : Julien Charles Louis Motais (1699 Rennes-1777 Brest), Receveur général des finances de Bretagne et de la ville de Brest, et Michelle Berthelot (1714 Rennes-1806 Brest).
(4) Les illustrations de ce texte sont extraites du Fonds Adèle Ferrand du Musée Léon Dierx.
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